Article : Les conducteurs de bus victimes d'agressions sur le réseau de la métropole d'Orléans

Rédigé le 04 mai 2021

Source : https://www.larep.fr/orleans-45000/actualites/les-conducteurs-de-bus-victimes-d-agressions-sur-le-reseau-de-la-metropole-d-orleans_13948315/

Transports

Les conducteurs de bus victimes d'agressions sur le réseau de la métropole d'Orléans

Insultes, menaces… Les conducteurs de bus sont soumis à des situations d’une extrême tension que la crise sanitaire n’a fait qu’accentuer. Témoignages sur le réseau orléanais.

Il n’a rien oublié de sa course du 26 mars dernier sur la ligne 2. "Un peu après la médiathèque, une voiture a pilé devant moi. Le passager est sorti, il voulait monter dans le bus. Entre deux arrêts, c’est interdit. Le ton est monté, raconte Gérald. La voiture a redémarré et le conducteur m’a suivi jusqu’à l’arrêt Vauquois. Il est sorti de son véhicule, il m’a insulté, il m’a menacé. La police est intervenue."

Six jours plus tard, nouvelle agression verbale. Cette fois, sur la ligne 3. Une porte s’ouvre mal, la situation dégénère. Les propos tenus par un passager et couchés sur le dépôt de plainte en attestent. "Ta gu… Je paie l’abonnement à l’année, j’ai le droit d’exiger que tu ouvres cette put.. de porte". Ce chauffeur a noirci une dizaine de plaintes en 2020.

"C'est quoi ton problème ?"

Florent, lui non plus, n’a pas été épargné. La scène s’est déroulée en avril dernier à l’arrêt Gare d’Orléans. "Une petite jeune s’est présentée en fauteuil roulant. J’ai voulu sortir la palette pour l’aider à monter. Seulement, elle fonctionnait mal. Un jeune, qui passait par là, est venu me voir. “C’est quoi ton problème ? Tu ne veux pas laisser monter la dame ?” Il m’a menacé en faisant le signe d’un couteau sous la gorge…"

Pas une journée sans une agression verbale sur le réseau de l’agglomération orléanaise. "C’est marquant psychologiquement", souffle Florent. "Je vais travailler en marche arrière. J’appréhende car les incidents se généralisent, confesse Gérald. Il y a déjà eu quatre agressions sur la ligne 5 à Saint-Denis-en-Val."

Masques et titres de transport

Le 24 mars dernier, un conducteur de la ligne 9 a été visé par du gaz lacrymogène, à La Croix-Fleurie ; un autre aurait été la cible de menaces de mort, de coups et et propos racistes le 26 avril dans le secteur du théâtre ;  à Saran, le 9 février, une conductrice a été violemment agressée.

Des lignes donc, sous haute tension ; les étincelles ne sont jamais loin. "Les agressions partent de tout et de rien : on suggère à un voyageur de valider son titre de transport ou de mettre son masque et la situation peut s’envenimer, constate un chauffeur. Des crachats arrivent alors sur la paroi qui nous protège."

"On vient au travail pour gagner notre croûte. Si en plus, on a des agressions, ça ne va plus…, prévient Sébastien Planchin, délégué syndical Sud TAO. Tous les jours, nous sommes confrontés à des agressions verbales, des bras d’honneur. C’est devenu une habitude."

"Un chauffeur ne doit pas être le punching-ball des problèmes de la société"

ROMAIN ROY
(Vice-président en charge des transports à la Métropole)

Faut-il banaliser cette violence ? "Un chauffeur ne doit pas être le punching-ball des problèmes de la société", insiste Romain Roy, le vice-président en charge des transports à la Métropole. Faut-il systématiser les dépôts de plainte ? "Tous les incidents ne font pas l’objet d’une plainte car cela prend du temps d’aller la déposer pendant le service", regrette un chauffeur préférant conserver l’anonymat.

Ce constat déplaît à Romain Roy. "Ce n’est pas le message que je veux entendre. Nous ne voulons rien laisser passer et nous vérifions que les chauffeurs portent bien plainte. Ils doivent être accompagnés." Il en convient, "des tensions existent sur le réseau. On y veille."

"Pas une explosion des agressions"

Pour les atténuer, il annonce un renfort de la police municipale intercommunale des transports. "Elle est composée aujourd’hui de 12 agents. Nous recruterons pour qu’elle retrouve son effectif de 16".

La cinquantaine de bus livrée, cette année, renforcera la sécurité des chauffeurs. "Il y aura un nouveau système de caméras et une grille capable de se lever en moins d’une seconde pour isoler le conducteur d’une agression."
Cela assainira-t-il la situation ? "On est dans une mauvaise série qui est inacceptable mais nous n’avons pas une explosion des agressions", assure Romain Roy.

"Dans 90 % des cas, la police des transports est appelée pour des litiges avec des fraudeurs, précise Florent Montillot, premier maire-adjoint à la sécurité. Elle n’est quasiment pas sollicitée pour des agressions physiques. Il faut faire la différence entre insultes et agressions physiques. La situation sur le réseau est sereine."

Les conducteurs et les contrôleurs nuanceront, sans doute…

Fabrice Mayer, directeur de Keolis Orléans - Val de Loire revient sur les incidents récents. 

"Il y a eu des incidents, coup sur coup, la semaine dernière. Pour autant, statistiquement, rien ne montre une dégradation. Ce sont des faits graves que nous retrouvons chaque année. Nous y sommes très attentifs. L’important est que les conducteurs ne se mettent pas en danger. Nous leur demandons de ne jamais quitter leur poste de conduite. Quand un conducteur est agressé, il appelle le PC. S’il le faut, nous dépêchons des soins. Sinon, on le relève, on lui fait passer un entretien pour qu’il évacue son stress. Et bien entendu, nous procédons à un dépôt de plainte. On lui propose, aussi, un accompagnement avec un psychologue. Déposer une plainte, ce ne sont pas deux heures de perdues. C’est le seul moyen pour déclencher une enquête. On essaie de faciliter la vie du conducteur."